La CADA fête ses 40 ans: retour sur les premiers pas de la transparence administrative

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Le premier logo de la Commission d’accès aux documents administratifs

La Commission d’accès aux documents administratifs fête ces jours-ci les 40 ans de la loi ayant posé les bases de la transparence administrative dans notre pays. A cette occasion, je vous propose un retour sur les jeunes années de la CADA. A quelques jours de l’application du principe d’open data par défaut et deux ans après la promulgation de la loi pour une République numérique, c’est aussi une manière de regarder dans le rétroviseur: comment passe-t-on d’un principe posé dans la loi à un droit effectif pour les citoyens et adopté par les administrations ?

Pour débuter, une confidence: je suis un grand amateur d’archéologie administrative et plus particulièrement de la lecture d’anciens rapports administratifs. Bref. Je me suis donc plongé avec gourmandise dans les tous premiers rapports d’activité de la CADA que l’on peut retrouver sur le site de la Documentation française.

La place de la technique: du droit d’accès au « droit à la photocopie »

Premier étonnement à la lecture de ces rapports: la place accordée à la question de la technique d’accès: comment accède-t-on concrètement aux documents administratifs ? La technique en vogue, en ce début des années 1980, c’est la photocopie. Il en question 21 fois dans le second rapport d’activité de la CADA qui va d’ailleurs jusqu’à affirmer que « l’absence de cet appareil [photocopieur] vide parfois de sens la liberté d’accès, aussi leur nombre devrait être multiplié, leur prix étudié en fonction du nombre d’exemplaires et leur délivrance obligatoire ».

La possibilité de reproduire des documents administratifs n’est pas seulement un moyen comme un autre d’exercer ce droit d’accès, cela ouvre d’autres usages possibles: photocopier un document (plutôt que le consulter sur place) permet de se constituer un dossier « au cas où ». A contrario, le format des planches cadastrales ne permet pas de les photocopier facilement, diminuant donc de facto la possibilité d’y accéder autrement qu’en allant les consulter sur place !

Cette relation entre le droit et la technique qui permet de l’exercer (la consultation sur place, la photocopie, l’envoi par courrier électronique, etc.) me semble encore tout à fait d’actualité au moment où l’on parle de téléchargements de données ou d’API. Ces techniques ne sont pas neutres, au sens où elles façonnent l’exercice pratique du droit et les usages qui sont alors permis.

D’un droit individuel à un droit collectif

Le second point qui émerge est le double usage du droit d’accès à l’information. Dès ces jeunes années – et je crois que c’est encore le cas aujourd’hui – la vaste majorité des saisines de la CADA concerne des demandes individuelles: accéder à un dossier médical, un dossier employeur, etc. Mais on voit aussi émerger peu à peu des demandes collectives, ou plutôt des demandes qui ne concernent pas uniquement un individu mais bien un collectif. C’est particulièrement visible dans le domaine de l’urbanisme ou de l’aménagement par exemple, où les associations commencent à se saisir de ce nouveau droit dans le cadre de leurs actions.

Là encore il y a je pense matière à réfléchir pour aujourd’hui. Nous avons construit le droit de l’ouverture des données publiques sur la base du droit d’accès. Or majoritairement les données ouvertes concernent des situations collectives et non pas individuelles. En ce sens, la portabilité des données personnelles, renforcée par le RGPD, peut davantage être vu comme l’héritier de ce droit individuel à l’accès…

Un droit qui s’affine et se précise, des actions vers le grand public

Troisième motif récurrent des premières années de la Commission: la construction progressive d’une doctrine autour de la loi d’accès aux documents administratifs. En rendant ses premiers avis, la CADA précise les conditions d’application du droit, au besoin en se référant et en interprétant les intentions du législateur.

L’autre préoccupation majeure des premières années d’existence de la CADA c’est de faire en sorte que ce nouveau droit puisse être connu, et donc exercé, par les citoyens. Le 4 décembre 1981, la CADA organise une journée dédiée à l’accès à l’information sur les ondes de Radio France. Plus de 400 appels seront reçus et orientés durant la journée !

On notera enfin que la question des délais de traitement, et donc celui des moyens alloués à la Commission est évoqué dès le début de son existence… constat (malheureusement) toujours d’actualité.